Des extrémistes prennent en otage le domaine public lausannois

MILITANTISME • Des stickers coriaces ont envahi le mobilier urbain dans le centre-ville de la capitale vaudoise. Avec des slogans politiques parfois radicaux.

  • «Résistance helvétique» est un mouvement nationaliste né en 2016. photo fnt

«Rejoins la Contre-Attaque, organisation pour une écologie anti-capitaliste», «Action Antifasciste», «La Suisse n’est pas une terre d’Islam, la Suisse n’est pas un hôtel». Tels sont le type de messages qui ont fleuri depuis le début de l’année au centre-ville de Lausanne. A l’aide de multiples autocollants fixés sur un grand nombre de poteaux, panneaux, poubelles et autres caissettes à journaux, des militants d’extrême gauche et d’extrême droite ont ainsi croisé le fer par slogans interposés collés illégalement. Et ces adhésifs ne se laissent pas enlever facilement, de quoi donner du fil à retordre aux employés de la Voirie. Au point de préférer les laisser sur place?
Démenti de Stéphane Beaudinot, chef du service de la propreté urbaine: «Les autocollants, tout comme les tags et les affiches sauvages, sont retirés tout au long de l’année par nos équipes de nettoyage et ce, quels que soient leurs messages. Nous priorisons les contenus injurieux, à caractère raciste ou incitant à la haine. En l’occurrence, les exemples que vous nous avez fait parvenir par e-mail ont été ou seront retirés ces prochains jours en regard de cette priorisation.» Lausanne Cités a pu constater que la majorité d’entre eux avaient en effet été enlevés après l’envoi de notre courriel. Le Service de la propreté a-t-il constaté une recrudescence de ce type d’affichage de la part d’extrémistes de tous bords, et une difficulté accrue à retirer ces stickers très adhésifs?
«Pour l’heure, nous n’en constatons pas, déclare Stéphane Beaudinot. Et nous utilisons différents produits selon le type de colle en présence. Nous ne tenons pas de statistique sur les autocollants dès lors que ceux-ci sont enlevés dans le cadre du nettoyage usuel du domaine public.»     
Pris en flagrant délit
Porte-parole des forces de l’ordre municipales, Jean-Philippe Pittet explique qu’en cas d’interpellations policières lors de flagrants délits, les individus posant des affiches ou des autocollants sont alors dénoncés à l’administration. «De tels cas ne sont pas fréquents, mais à la mi-février un groupe de personnes a été contrôlé lors de collage d’autocollants par une patrouille au centre-ville un dimanche soir alors qu’il faisait nuit, puis dénoncé pour infraction au Règlement général de police de la commune de Lausanne, précise l’officier Jean-Philippe Pittet. Nous ne tenons pas de statistiques quant au nombre de situations constatées, lesquelles sont transmises à la Commission des contraventions.»
Problème de priorisation des tâches
Ces actes d’appels militants parfois radicaux et relevant d’incivilités doivent-ils être pris au sérieux? S’agit-il d’un baromètre d’un état d’esprit qui grandit au sein de certains groupes de jeunes? Nous souhaitions recueillir l’avis du responsable de la sécurité publique, le municipal PLR Pierre-Antoine Hildbrand, mais il n’a pas souhaité répondre. Présidente de son parti politique au niveau communal, Mathilde Maillard est plus diserte sur ce sujet. «Cela m’horripile de voir des dégradations de l’espace public, s’émeut la jeune politicienne et avocate. Ce d’autant plus qu’on a la chance de vivre dans un état démocratique riche où il y a d’infinies possibilités de faire passer ses messages politiques de manière respectueuse. Ceux qui sont pris en flagrant délit doivent évidemment être punis selon le règlement en vigueur. Cela étant, on ne peut pas mettre un policier derrière chaque poubelle pour attraper ceux qui collent des stickers, il y a donc également un travail de propreté urbaine, a posteriori, à effectuer.»
Selon Mathilde Maillard, c’est un problème à Lausanne et «un effort particulier doit être mis là-dessus. Mais avant d’affirmer qu’il faut augmenter le budget ou les effectifs, on peut questionner l’organisation actuelle et la priorisation des tâches… Je pense, par exemple, aux personnes qui se sont faites amender car elles jetaient des déchets ménagers, comme des paquets de biscuits, dans des poubelles publiques.»