«Ils veulent un permis, pas l’assistance»

MIGRANTS SQUATTERS • Michel Cornut, chef du service social de Lausanne revient sur l’occupation du jardin du Sleep-in par des migrants.

L’évacuation du jardin du Sleep-in de Renens le mois dernier, a conduit de nombreux migrants à squatter une ancienne école le long de la route de Berne. Cette évolution de la situation vous a-t-elle surpris?

Michel Cornut: Un mouvement de solidarité, d’humanité, s’est constitué autour de personnes en détresse, ce n’est heureusement pas surprenant.

Peut-on réellement connaître l’histoire et le parcours de ces migrants?

Nous avons constaté que la plupart d’entre eux sont de nationalité nigériane. Et quelques-uns ont spontanément déclaré, notamment à la presse, qu’ils avaient déjà demandé l’asile aux autorités compétentes, mais sans succès.

Selon vous, les occupants de cette maison ont-ils des revendications particulières?

Les hommes que nous avons rencontrés sont sérieux et dignes. Incontestablemet, ce qu’ils demandent, ce n’est pas l’assistance, mais un permis de séjour. Ils souhaitent travailler, faire vivre leur famille. Qui ne le comprendrait pas? Maintenant, chacun sait que la Ville de Lausanne n’est pas en mesure de délivrer de tels permis (Note de la rédaction: C’est une compétence cantonale).

Pourquoi ne pas transformer cette maison en lieu d’accueil encadré? N’avez-vous pas un devoir moral d’aider ces gens ?

A ma connaissance, Lausanne est la ville qui en fait déjà le plus, en Suisse, au regard du nombre de ses habitants. Plus de 2’000 migrants de près de 100 nationalités différentes recourent chaque année à nos services pour manger, dormir, se laver, faire leur toilette, faire leur lessive, être orientés et conseillés. Mais la question qui se pose aujourd’hui est de savoir si une commune peut ou doit offrir un refuge à des personnes auxquelles la Confédération n’a pas accordé l’asile ou à des personnes auxquelles le Canton n’a pas accordé de permis. Si nous le faisons, une seule maison ne suffira pas, assurément. Et que feront ces personnes, une fois abritées? De quoi vivront-elles ?

Donc, selon-vous, une ville doit refuser d’accueillir socialement un migrant débouté ?

L’EVAM accueille en permanence, plus de 1’000 déboutés de l’asile jusqu’à la date de renvoi. Que se passerait-il si Lausanne s’engageait dans une forme de désobéissance civile en leur permettant de rester au-delà de cette date? Et que se passerait-il si notre ville était connue, loin à la ronde, pour offrir une telle possibilité?

Cette situation de migrants ayant trouvé un squat étant exceptionnelle, ne serait-il pas judicieux d’organiser une prise en charge tout aussi exceptionnelle ?

Ils sont plus de cinquante, dans cette maison, et beaucoup d’autres qui espèrent, dans le canton et au-delà, une issue positive. La décision est donc clairement du ressort des autorités. Je me figure qu’elles se demandent à quoi ressemblerait une politique consistant à aider, «exceptionnellement», seulement ceux qui prennent possession d’un jardin ou d’une maison.