«On veut détruire la culture dans notre ville»

NUITS LAUSANNOISES • Thomas Lecuyer, fondateur du Lido Comedy & Club et du Blues Rules Festival à Crissier vient de sortir son premier roman. Cet hyperactif de la culture lausannoise n’est pas tendre avec les nouvelles règles de la ville concernant la vie nocturne

  • Thomas Lecuyer, un Parisien qui croit encore aux nuits lausannoises.

    Thomas Lecuyer, un Parisien qui croit encore aux nuits lausannoises.

En deux ans, le Lido Comedy&Club, situé au milieu de la rue de Bourg, est devenu l'un des lieux incontournables des nuits vaudoises. Sa programmation éclectique mêlant clubbing, humour et musique lui permet de réunir quasiment quotidiennement un public très large. Mais, depuis l'application de la nouvelle loi, le patron s'inquiète de la santé de son établissement : «Je ne veux pas réagir de manière hystérique comme certains sur Facebook, mais il faut que la population comprenne que ces règles sont inapplicables et favorisent les mastodontes du clubbing». Avant de devenir l'un des nouveaux personnages marquants de la culture lausannoise, Thomas Lecuyer travaillait dans l'événementiel et la publicité en plein cœur de la capitale française.«Et même si j'habitais le quartier très chaud de Château Rouge, je suis frappé par la mauvaise gestion des dealers par la ville. En fait, c'est aussi facile de trouver de la coke à Lausanne que de la fondue à Fribourg», ajoute-t-il. De plus, à l'en croire, la gestion d'une partie du problème de la vente de drogue s'est déplacée sur les clubs. En effet, la nouvelle loi prévoit que la gestion de la sécurité d'un périmètre d'espace public à proximité de l'entrée soit sous la responsabilité de l'établissement. «Il faudrait donc que mon service de sécurité intervienne dans la rue de Bourg pour chasser des dealers au risque de créer une rixe», soupire le gérant du Lido.

Gros sous

Dès les premiers débats sur une nouvelle législation des nuits lausannoises, les exploitants de lieux culturels nocturnes s'étaient regroupés dans le Pool Lausanne la Nuit. Celui-ci, représenté par Thierry Wegmüller, avait finalement décidé de ne pas faire recours contre les nouvelles règles. «Pas étonnant qu'il nous ait lâché, son club (n.d.l.r le D ! Club) est l'un des plus grands de Lausanne. Il peut donc absorber les nouveaux coûts sans problème tout en espérant que les plus petits feront vite faillite», commente Thomas Lecuyer. Concrètement, au lieu de restreindre les heures d'ouverture, la nouvelle réglementation prévoit des taxes importantes pour tous les établissements qui désirent augmenter leurs heures d'activité. « C'est 15'000 francs de plus par année que je verse à la ville et que je ne peux pas consacrer au soutien de groupes de musique locaux ou à l'organisation de spectacles ! »

Les clubs ou la rue

L'objectif avoué de Grégoire Junod est d'apaiser les nuits en raccourcissant notamment le temps que peuvent passer les clients à boire de l'alcool. Une idée qui ne séduit par Thomas Lecuyer : «Je soupçonne surtout Junod d'espérer que la culture lausannoise se détruise petit à petit afin que notre ville soit moins attractive. Personnellement, je préfère que ma fille passe sa soirée dans un club plutôt qu'elle boive n'importe quoi avec des amis dans un parking sous-terrain.»Il finira tout de même par reconnaître que cette fermeture précoce a au moins eu le mérite de lui laisser le temps de rédiger son premier roman «Deux minutes d'arrêt» publié ce mois aux Editions Le Manuscrit. Il y imagine l'histoire d'un homme qui perd la trace de sa femme et son enfant alors qu'ils voyageaient tous ensemble dans un TGV.