«Il n’y a pas de salafistes à l’UVAM»

RELIGION • Accusée d’abriter en son sein des salafistes, l’Union vaudoise des associations musulmanes répond par la voix de son président, le Morgien Pascal Gemperli.

  •  Pascal Gemperli, président de l’Union vaudoise des associations musulmanes. dr

    Pascal Gemperli, président de l’Union vaudoise des associations musulmanes. dr

Présidente du Forum pour un islam progressiste, Saïda Keller-Messahli a proféré des accusations directes contre l’UVAM (, 28 avril 2017)...

Je suis un peu déçu de cet article du Temps, qui nous a habitués à un peu plus de profondeur. Ce qui me dérange dans cette affirmation c’est que l’on puisse proférer des accusations graves sans les justifier d’aucune manière. D’ailleurs j’ai déjà constaté à une ou deux reprises que Mme Keller-Messahli pouvait être à l’origine de fake news. Cela fait dix ans que je suis à l’UVAM et cela fait 10 ans que j’entends ce genre d’accusations, toujours sans preuves…

Selon elle, l’UVAM compterait des salafistes en son sein. Est-ce vrai ou faux?

C’est faux. Le mot «salafiste» est devenu un mot-valise que l’on utilise pour dénigrer et discréditer, pour faire peur aux gens. Elle affirme aussi que «la grande majorité des imams de Suisse est orientée vers le salafisme», ce qui n’est vraiment pas sérieux! Elle a essayé, en vain, d’empêcher un imam de participer à la bénédiction officielle du nouveau tunnel du Gothard en le discréditant comme salafiste. Pour elle, une telle inauguration ne devait pas être pratiquée par un imam mais par une femme indépendante. Je vous laisse imaginer à qui elle pensait.

Tout de même, l’UVAM ne compte-t-elle pas en son sein des adeptes de pratiques plutôt orthodoxes?

Dans toutes les religions vous avez des orthodoxes. Par exemple, la très grande majorité des dispenses demandées dans les écoles suisses émanent de communautés chrétiennes. Le refus de la poignée de mains n’existe pas seulement chez les musulmans. Tout ça se passe à huis clos, pendant que les projecteurs sont sur notre communauté. Selon ses propres dires, Mme Keller-Messahli n’est pas pratiquante et ne fréquente pas les mosquées. Elle est déconnectée de la communauté de laquelle elle parle. Mais elle a réussi avec sa manière agressive à se mettre sur le devant de la scène et c’est devenu son business model, puisqu’elle vit des conférences et des formations qu’elle donne sur la communauté musulmane.

Mme Keller-Messahli se prononce contre la reconnaissance de l’UVAM par l’Etat de Vaud, au motif qu’on «ne peut reconnaître des organisations qui ne sont pas 100% loyales»...

Loyales à qui? A elle? Et puis qu’entend-on par 100% loyales? La reconnaissance s’adresse à des communautés religieuses qui œuvrent dans l’intérêt public, donc des associations composées de personnes plus ou moins pratiquantes qui gèrent des lieux de culte. Aucune communauté ne pourrait être reconnue si on se basait uniquement sur le critère de la fréquentation de ces lieux par des personnes plus orthodoxes. En outre, Mme Keller-Messahli propose elle-même d’élaborer une loi sur la communauté musulmane, or c’est exactement ce qui sera fait dans le cadre d’une reconnaissance, cela semble lui avoir échappé. Enfin, il faut rappeler que seules les autorités ont la compétence pour décider de qui est loyal ou pas. Dans le canton, elles procèdent à des vérifications minutieuses durant au moins 5 ans avant de reconnaître une organisation religieuse. C’est d’ailleurs pour cette raison que la reconnaissance de l’UVAM par l’Etat est importante: elle permettra de mettre fin à toutes les insinuations...

Récemment encore, un jeune Lausannois qui fréquentait la mosquée de Prélaz est parti faire le djihad en Syrie. L’UVAM agit-elle dans ce genre de situation?

Comme tous les citoyens, nous prônons le respect de l’ordre juridique suisse, le dialogue inter-religieux et la paix sociale. Si nous avions eu connaissance d’un cas comme celui-ci, nous aurions bien sûr tout fait pour le dissuader de partir. Mais je tiens à rappeler que ce genre de comportement relève d’abord de la police et de la justice, et l’UVAM n’a pas à prendre toute la responsabilité des bêtises potentiellement commises par des musulmans vaudois. 