Mathilde Cruchet: le talent et la détermination

HIPPISME • La Lausannoise Mathilde Cruchet fait partie intégrante de l’équipe de Suisse des jeunes cavaliers. Bientôt, elle sera en élite. Elle gagne, elle aligne les podiums en saut d’obstacle en Suisse et en Europe. Et les sans-faute. Rencontre.

  • Mathilde Cruchet: du ralent à revendre.

    Mathilde Cruchet: du ralent à revendre.

Mathilde Cruchet a 20 ans. Au ranking suisse de sa catégorie, elle est 3e (les deux premiers sont des garçons), un classement qui situe son degré de grande qualité. A son âge, la Lausannoise pure souche fait déjà partie des cracks et elle jongle avec un emploi du temps de ministre. Elle est étudiante en droit, et ce mois elle a des examens «Première année Bachelor», annonce-t-elle sans moue ni appréhension. Au rendez-vous à Saint-François elle est arrivée à l’heure. Avec le sourire, une beauté sans fard, une belle humilité. Quand on cultive tout naturellement ce trait de caractère, la légèreté des mots, fragiles ou pas, tombe à chaque fois de manière juste.

Lausanne Cités: Quelles qualités pensez-vous avoir?

Mathilde Cruchet: Je suis persévérante, rigoureuse, déterminée (voir la vidéo Mathilde Détermination), je ne suis pas du genre à changer souvent d’avis, ni à baisser les bras. Pour être performante, je travaille moi-même avec mes chevaux. J’en ai 5. Ils se trouvent à Sottens. Je passe tout mon temps avec eux . Le matin, très tôt, ou le soir très tard. Je suis à l’UNIL de 8h à 18h.

Avec l’Equipe de Suisse des jeunes cavaliers - quasiment tous sont pros dans cette catégorie dans laquelle on est jeunes jusqu’à 21 ans, après c’est l’élite -, vous vous êtes qualifiée pour les Championnats d’Europe, qui auront lieu aux Pays-Bas...

... Et pour être sélectionnée, il faut continuer à faire des résultats en Coupe des Nations à l’étranger, dans des CSIO (Championnat de saut international officiel) ou dans des GP en Suisse. Généralement, je prends avec moi 2 chevaux - parfois 3-, parce que c’est la paire qui se qualifie.

Dans la discipline du saut d’obstacle, qui est le plus important de vous deux?

Le cheval a une grande importance, mais il faut un bon pilote. Le cheval accomplit une grosse partie du travail, après c’est moi qui donne l’impulsion. J’ai les rênes en mains, non?

Qu’est-ce qu’un bon cheval?

C’est un cheval qui est bien dans sa tête, qui est un «guerrier», qui a un bon mental, qui veut tout le temps aller au-delà de l’obstacle. Plus je vais de l’avant et plus je me rends compte qu’il doit avoir de la force, à considérer la hauteur des barres de plus en plus haute (1m50 et plus), la largeur des obstacles, la technicité des parcours et la difficulté des combinaisons. Il ne faut pas avoir une «bicyclette», mais un «avion de chasse».

Savez-vous quand un de vos chevaux n’est pas au mieux?

Oui, un cheval a des humeurs, des baisses de forme. Comme nous, non? Un cheval est à la fois un miroir et une éponge. Je sens ça, je remarque tout de suite quand ça ne va pas. Il suffit d’un regard, d’une attitude, ou de la manière dont il bouge.

Une bonne cavalière, c’est...

... Je ne peux pas généraliser, alors je parle pour moi. Je suis une cavalière sensible, très sensible, doublée d’une perfectionniste. Il y a des cavaliers qui se posent moins de questions. Je monte avec du sentiment, il y a du feeling au bout. Il faut aussi avoir des nerfs solides, surtout dans un barrage, qui est toujours déterminant.

Dans votre viseur de rêve, n’y a-t-il pas les JO de Tokyo en 2020 (équipe formée de 3 cavaliers au lieu de 5 comme précédemment, aussi en dressage et au complet)?

Trois seulement? Ça je l’ignorais, je vais vérifier si c’est vrai. Ça veut dire qu’on n’a plus le droit à l’erreur. Avant, on était 5, avec un réserviste. Quatre concouraient et

on ne prenait pas en compte le moins bon résultat. Les JO de Tokyo viennent peut-être trop vite pour moi mais sait-on jamais. Après, il y aura ceux de Paris en 2024.

Un cheval (son entretien, les déplacements en camion qu’il faut louer, notamment), coûte cher, mais cinq...

(Elle joint un geste à ses paroles)-... Ouh là là oui, ça coûte très cher. Heureusement, on me soutient financièrement, on me parraine. L’Aide sportive suisse me parraine depuis 2010, la Ville de Lausanne, le Canton de Vaud, une banque privée, mon équipementier aussi, ainsi que ma maman et mon beau-père. Sans tous ces apports, rien ne serait possible. Ils sont indispensables. Je trouve génial d’en avoir. Etant étudiante, je n’ai aucun revenu.

Quel est le talent, l’atout que vous rêveriez d’avoir encore?

(Elle réfléchit) - On peut passer à une autre question? (Puis). J’ai un bon mental mais j’aimerais qu’il soit en acier pur.

Avez-vous un préparateur mental?

Oui, ça fait 8 ans, depuis mon arrivée dans la catégorie «Children». C’est une dame, elle a eu (notamment) comme client Roger Federer et Tiger Woods. Aujourd’hui, je la contacte 3 à 4 fois par an. Auparavant, je la voyais environ une fois par mois.

Vous pratiquez aussi le kick-boxing.

Une fois par semaine. C’est super, au niveau de la tonicité, de la motivation et de la détermination. Le kick aide au lâcher prise. Dans la séance, il y a une place pour la musculation. Mon prof me forme aussi à l’auto-défense. Par les temps qui courent, je trouve ça bien et surtout nécessaire.

Vous avez aussi «fait» du mannequinat. Ça vous a plu?

Oui, j’ai été mannequin pour des boutiques de mode. Une agence m’avait repérée. J’ai aussi fait quelques shootings, une pub pour Audi. J’ai été hôtesse d’accueil pour divers salons et pour des soirées de gala. J’ai trouvé ces moments sympas et ça m’a rapporté quelques petits sous.