La Riponne ou l'aveu implicite d’un échec

DROGUE • Un nouvel espace de consommation sécurisé pour les toxicomanes va voir le jour à la Riponne. Il montre l’échec d’une Municipalité qui peine à trouver des solutions pérennes au deal.

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La nouvelle est tombée le 5 avril dernier: la Ville de Lausanne va mettre en place un second Espace de consommation sécurisé (ECS) pour les toxicomanes. Conçu comme un projet pilote, il sera situé juste à côté du Folklor Club, à la Riponne. Cinq ans après l’ouverture de celui du Vallon, voilà donc la naissance plutôt inattendue d’un second lieu destiné au shoot à Lausanne.

En 2018, à l’occasion de l’ouverture de son premier ECS, la Ville avait justifié son éloignement du centre par sa volonté de réduire l’impact de la consommation de drogues, pour les usagers comme pour la population. Elle voulait aussi éloigner les consommateurs de la Riponne dans l’espoir de rompre la dynamique du deal qui en était devenu indissociable. A l’époque déjà, des voix s’étaient élevées pour dire que cela ne résoudrait rien, justement parce que ce lieu était trop éloigné du centre névralgique du trafic de rue. Dans ce contexte, l’annonce de la création de ce nouvel espace résonne comme l’aveu implicite d’un échec, puisque la Ville rétropédale et doit aujourd’hui se résoudre à renforcer son dispositif là où elle ne le voulait pas initialement. Cela même si elle argue du fait que ce nouvel ECS est aussi une alternative nécessaire pour se rapprocher des consommateurs restés sourds jusqu’ici aux incitations à consommer cachés.

Une stratégie maladroite

A ce titre, l’attitude est noble, mais sur le fond, comme sur la forme, cette opération laisse dubitatif. Sur le fond, d’abord. Le lieu choisi comprend des commerces, des restaurants et accueille maraîchers et brocanteurs alors que son parking génère un mouvement incessant de personnes en surface. Cerise sur le gâteau, une garderie fera face… au nouvel espace. On pouvait donc difficilement imaginer pire endroit, ceci d’autant plus que son ouverture ne fera disparaître ni les consommateurs, ni les dealers qui continueront leur petit business sur la place… ou à côté. Il laissera ainsi la Riponne dans l’état de déliquescence dans lequel elle se trouve depuis longtemps. Sur la forme ensuite. Plutôt que de passer par un préavis, la Municipalité a voulu faire toute seule. Elle en a le droit, mais cette stratégie est maladroite et suscite déjà la grogne. Elle démontre en tous cas une fébrilité certaine de sa part, sur un sujet certes ultra-sensible, mais qui mérite bien mieux qu’un passage en force.