Coup de Coeur / Griffe du 18.06.2014

Voilà bientôt 38 ans que j’ai mon permis de conduire, et j’ai dû, au maximum, klaxonner une cinquantaine de fois. Une ou deux fois par an. Lorsque vraiment il y a danger. Pour le reste, j’ai toujours considéré cette immonde percussion venteuse comme le sommet de l’agression sonore. Bruit hideux, strident, belliqueux. Rupture de la paix des âmes. Tocsin de haine. Occasion inespérée pour le beauf d’accéder au langage des sons. Bref, les klaxons, non merci.

 

C’est dire si j’aime la période du Mondial. En 1982, je m’en souviens comme d’hier, les Italiens, sous ma fenêtre et partout dans le monde, avaient klaxonné toute la nuit. Ils avaient vaincu l’Allemagne en finale, c’était magique, le bonheur était azur, on leur avait pardonné le boucan nocturne. Pour un peu, on serait repartis, libérer Fiume. Et jusqu’à Raguse.

Et puis, de quatre ans en quatre ans, ils se sont tous mis à klaxonner de plus en plus tôt dans le tournoi. Au point qu’au soir de ce lundi 16 juin, rentrant chez moi vers 20h, je suis tombé sur des centaines de supporter portugais klaxonnant alors qu’ils venaient de subir une cuisante défaite face à l’Allemagne. Klaxonner au premier tour, alors qu’on vient de perdre!

Ca n’est même plus le klaxon pour la victoire, comme le péan d’antan. Non. C’est juste le klaxon pour le klaxon. Degré zéro du son. Mise à mort de l’harmonie. Et justement, c’est si beau, la magie d’un soir d’été.