Article sur le féminisme: vos réactions et... notre commentaire

POLEMIQUE • Notre article de la semaine dernière, intitulé «Le mal dominant» et consacré aux féministes extrémistes, a suscité une kyrielle de réactions. Elle a conduit certaines à brûler notre journal sur la place publique. Vous trouverez ci-dessous une sélection des commentaires qui nous ont paru les plus emblématiques, ainsi que notre propre adresse aux lecteurs.

  • Dans la nuit de jeudi à vendredi, Lausanne Cités était brûlé sur la Place de la Riponne par de jeunes féministes radicales. VERISSIMO

    Dans la nuit de jeudi à vendredi, Lausanne Cités était brûlé sur la Place de la Riponne par de jeunes féministes radicales. VERISSIMO

 

«Les propos de Monsieur Bonavita sont pour le moins surprenants, désopilants voire un tantinet provocateurs. Mais je suis ahurie de lire dans son éditorial le mot «hystérique», vieux mot du siècle passé, que l’on n’entend plus que dans la bouche de certains machos pas très éduqués. Vous lire m’a mise en colère... et merci, mon utérus va très bien!»

«Ce pamphlet tourne en dérision l’engagement et les revendications d’une large fraction de la population, en particulier par l’usage répété du vocable misogyne “d’hystérie”, chargé de sens et d’histoire, et va jusqu’à railler implicitement celles qui “crient” contre ces hommes qui tuent leur femme.»

«C’est la première fois que je vois un article de cette qualité qui traite du problème de ces mouvements revendicateurs féministes basés plus sur l’idéologie du genre que sur la réalité de l’égalité homme-femme souhaitée.»

«J’ai bien saisi les nuances dans cet article, et je suis d’accord que le manifeste contient beaucoup de revendications qui sortent un peu du contexte de cette grève. J’avoue que certains points m’ont étonnée (mais pas choquée). On peut tout de même comprendre que si ça n’arrive que tous les 30 ans, on en profite pour dire tout ce qu’on a sur le cœur. Je suis navrée d’apprendre que vos vitrines ont été vandalisées: il est évident que dans un mouvement d’une telle ampleur (que votre article voulait également minimiser!), on trouve toujours des gens qui vont trop loin. Pour certain-e-s, brûler des articles ou détruire des vitrines est plus facile que de prendre la plume.»

«Quelle honte d’avoir écrit et publié une daube pareille! Donc le problème serait que les féministes sont “trop méchantes” et qu’elles donnent pas assez la parole aux hommes?»

«En lisant les mots de ce journaliste, je constate un homme blessé dans son orgueil machiste.»

«Si vous vous étiez renseignés un tant soit peu sur le sujet, vous auriez appris que les revendications amenées sont déjà tout à fait légitimes et participent à un grand mouvement de modification des mentalités, travail de très longue haleine mais qui a pour but une société plus égalitaire donc moins violente à tous les niveaux.»

«Brûler un texte qui ne plaît pas, sérieusement? Tous les exemples historiques d’une telle attitude ne sont vraiment pas à l’avantage de celles et ceux qui l’ont fait... On pourrait peut-être débattre publiquement de cet article de manière constructive et argumentée, non?»

«M. Bonavita est-il un journaliste qui informe ou un individu qui donne son avis? Est-ce un éclairage ou une opinion?»

«Pour l’égalité salariale, il suffit de baisser le salaire des hommes au niveau de celui des femmes.»

«Ce matin du 14 juin, peu d’hommes étaient présents, j’étais entourée de personnes vivant les mêmes discriminations que moi. Je me suis alors sentie forte et heureuse de l’ambiance sororitaire qui s’en dégageait. »

«Historiquement, l’usage des mots “hystérique”, “hystérie”, “hystérisation” a systématiquement été utilisé pour décrédibiliser les femmes. Votre article - d’ à peine une page - les a utilisés quatre fois.»

«Par ces quelques lignes, je vous remercie pour votre article intitulé «Féminisme: le mal dominant», qui m’a rassurée suite à cette effrayante déferlante anti-hommes, dont certaines femmes et certains médias nous ont abreuvés.»

«Votre article présente cette marche comme une guerre des sexes, alors qu’elle représente un pas vers une égalité des sexes.»

«Votre journaliste pourrait prendre conscience que le ton de son article est exactement à l’image de ce qu’il dénonce: hystérique, discriminant et dans la victimisation.»

«Il est toujours essentiel de faire entendre des voix qui se distinguent des grands courants de consensus, et à ce titre vous avez bien rempli votre rôle en écrivant cet article. En revanche, par le choix de vos mots, de vos tournures de phrases et de vos citations, vous avez réussi à incarner exactement la posture méprisante que les féministes cherchent à visibiliser et combattre.»

A nos lectrices et nos lecteurs

«Si nous pensons tous la même chose, c’est que nous ne pensons plus rien».

Jamais, cette phrase du politicien français François Bayrou n’aura trouvé autant d’écho que ces derniers jours dans notre ville de Lausanne où notre article de page 3 de la semaine dernière a suscité bien des réactions: lettres injurieuses, tags sur les murs et les vitrines de notre journal et, hélas, exemplaires de Lausanne Cités brûlés publiquement sur la Place de la Riponne, en compagnie de livres jugés non conformes, par quelques féministes aussi exhaltées qu’extrémistes. Un autodafé qui rappelle au passage de sombres épisodes de l’histoire, sans vouloir exagérer, mais sans l’occulter non plus, même si, et heureusement, nous avons aussi reçu des messages courroucés, mais respectueux, de soutien aussi, tous intelligemment argumentés.

Quel est donc notre tort? Quel affront irréparable avons-nous commis qui puisse justifier de tels dérapages, une telle violence verbale, indignes d’une démocratie moderne telle que la nôtre?

Notre but n’était bien évidemment pas de critiquer de quelque manière que ce soit le principe de la grève des femmes de ce vendredi 14 juin. Mais plutôt de nous interroger sur les «dérives» des féministes radicales qui souhaitaient, par exemple, en exclure les hommes - ce qui était prévu initialement. Mais ce n’est pas tout! Peu de gens ont pris la peine de lire le Manifeste officiel du mouvement de grève. Comme le rappelait fort justement ce lundi matin, sur les ondes de la RTS, notre consœur Delphine Gendre, ce qu’on y lit semble aussi surréaliste qu’excessif: on y apprend ainsi «qu’en Suisse toutes les femmes sont victimes de violences», que «leur sexualité y est méprisée», «qu’elles n’y auraient pas les mêmes droits» et que «leurs tenues vestimentaires leur sont imposées!»

Ce sont ces amalgames et ces outrances que nous voulions dénoncer et qui se trouvent aujourd’hui confirmés par les actes malveillants commis à notre encontre, alors qu’il ne saurait y avoir de débat démocratique sans pensée dissonante!

Sur la forme, nous admettons volontiers que cet article aurait dû être écrit avec plus de tact. Mais si le ressenti de nos lectrices et lecteurs doit être respecté, est-il besoin de rappeler que depuis de longues années, Lausanne Cités s’est aussi fait l’écho des multiples actions féministes qui ont eu lieu dans notre ville et a scrupuleusement donné la parole à toutes et à tous de manière équilibrée. Curieusement, personne n’a relevé que juste au-dessous de notre article, notre invitée de la semaine, conseillère communale lausannoise, appelait clairement à la grève!

En tant que média indépendant, notre ADN est certes d’informer, mais aussi de susciter le débat, de faire réfléchir, à rebours de toute pensée dominante souvent porteuse des germes de l’excès. Cette démarche est plus que jamais indispensable dans une démocratie de plus en plus soumise au diktat des réseaux sociaux et au vacarme suscité par les plus bruyants, qui ne sont pas nécessairement les plus représentatifs. Cette mission, quoiqu’il advienne, nous continuerons de l’assumer, en veillant toujours à rester le porte-voix de celles et ceux qui se sentent écrasés par les excès de la pensée dominante.

Lausanne Cités