L'affaire Anthamatten: quand le laxisme et l’amateurisme conduisent à la mort

FAIT DIVERS • Cet été, nous revenons chaque semaine sur un fait divers lémanique ayant marqué les Romands. Aujourd’hui, l’affaire Anthamatten. A Genève, ce psychopathe multirécidiviste avait égorgé sa sociothérapeute lors d’une sortie qui n’aurait jamais dû avoir lieu.

Cette affaire particulièrement sordide avait tristement souligné l’amateurisme et l’angélisme des HUG, de l’Office cantonal de la détention, du Service d’application des peines et du centre de sociothérapie de la Pâquerette, alors installé à l’époque dans l’enceinte de la prison de Champ-Dollon. Leurs erreurs répétées et conjuguées avaient fini par coûter la vie à Adeline M., jeune sociothérapeute de 34 ans, alors maman d’une petite fille d’à peine huit mois.

Obsédé par une ex

En cet horrible 12 septembre 2013, la Genevoise s’était en effet retrouvée en position d’accompagner un psychopathe pervers à une séance d’équithérapie du côté de Bellevue (GE), qui n’aurait jamais dû avoir lieu, vu la dangerosité, richement documentée, de l’intéressé. Son nom bientôt connu de tous? Fabrice Anthamatten. Ce Franco-Suisse de 42 ans au regard mauvais, élevé dans une famille totalement dysfonctionnelle et déjà condamné à 20 ans de prison pour deux viols commis en 1999 et en 2001, avait minutieusement planifié son assassinat depuis sa cellule de La Pâquerette.

Le jour du crime, Adeline M. prend le volant de son véhicule de service en direction des rues Basses pour aller retirer un couteau de chasse Victorinox, destiné à dépecer les animaux et préalablement réservé par téléphone sans qu’elle le sache par Fabrice A. Un repas dans la très chic brasserie Lipp avait même été mis au programme de cette sortie! La jeune femme n'arrivera jamais au centre équestre de Bellevue. Son agresseur l’attache à un arbre situé non loin dans un bois, avant de lui trancher la carotide, comme dans cette scène du film «Braveheart» qu’il se passait en boucle dans sa cellule. Le psychopathe prit ensuite la fuite en direction de la Pologne comme il en rêvait depuis des mois. Là, il comptait retrouver une Polonaise qui l’obsédait et avec laquelle il avait eu une relation entre 2000 et 2001 et lui crever les yeux. La police locale l’arrêtera avant qu’il ne parvienne à ses fins.

On avait appris au fil de l’affaire que lors de son incarcération à la prison de Bochuz, Anthamatten fréquentait le tristement célèbre tueur en série connu sous le nom de «sadique de Romont». Dans sa cellule de La Pâquerette, le quadragénaire affichait des posters de l’antihéros de cinéma Hannibal Lecter dont il possédait aussi des médaillons.

«Jouissance»...

«Oui, j’ai effectivement ressenti de la jouissance en l’égorgeant», avait fini par reconnaître sans gêne apparente, lors de son procès, cet homme souffrant, d’après les experts, de «personnalité dyssociale avec trouble de la préférence sexuelle». En mai 2017, Fabrice Anthamatten avait finalement été condamné à la prison à perpétuité pour ces faits. Sa peine avait alors été assortie d’une mesure d’internement «ordinaire». Cela signifie qu’il est très peu probable que ce criminel irrécupérable recouvre la liberté un jour. Ses juges avaient retenu la préméditation et estimé la responsabilité de l’assassin «pleine et entière» et ses risques de récidive «très élevés».

«Il a agi avec froideur et lâcheté pour un mobile particulièrement odieux: réaliser son fantasme d’égorgement et assouvir une pulsion de toute-puissance», avait lâché le président du Tribunal criminel. En octobre 2013, un rapport accablant, commandé à l’ancien conseiller d’Etat et avocat Bernard Ziegler avait mis à jour les très nombreux dysfonctionnements ayant conduit au drame.